Soutenance de thèse d'Hélène Defendini
Amphi Moule, campus de Rennes
Bases génétiques et conséquences évolutives de la perte du sexe chez les pucerons
Thèse dirigée par Jean-Christophe Simon, UMR Institut de Génétique, Environnement et Protection des Plantes (IGEPP)
Spécialité : Écologie et évolution
Résumé
La reproduction sexuée, ancestrale aux eucaryotes, a été perdue à plusieurs reprises. Comprendre l'apparition et la persistance des espèces asexuées est un défi majeur de biologie évolutive. Cette thèse explore les bases génétiques et les implications évolutives de la perte du sexe chez les pucerons qui présentent un polymorphisme de reproduction. Leur mode de reproduction ancestral est la parthénogenèse cyclique (CP, alternant entre générations clonales et sexuée) mais la parthénogenèse obligatoire (OP, seulement clonale) est fréquente. Les lignées OP ne produisent pas de femelles sexuées mais peuvent encore produire des mâles. Pour caractériser les régions génomiques impliquées dans la transition de la reproduction CP à OP, des scans génomiques ont été réalisés sur quatre taxons de pucerons révélant des bases génétiques différentes. Ces résultats suggèrent que plusieurs voies mènent à l'asexualité dans ce groupe. Ensuite, les conséquences évolutives de la perte du sexe sur les traits et les gènes essentiels à la reproduction sexuée ont été étudiées. Les mâles OP, peu susceptibles de transmettre leurs gènes, présentent des traits semblant dégénérer comme attendu sous sélection relâchée. L'expression des gènes des femelles parthénogénétiques OP n'est plus contrainte par celle des autres morphes. La résolution du conflit sexuel dans ces lignées devrait donc entraîner des changements d'expression. Nous avons en effet constaté des différences d'expression entre les morphes OP et CP mais pas toujours conformes à nos prédictions. Cette thèse souligne l'importance d'utiliser des espèces à reproduction polymorphe pour comprendre l'histoire évolutive de la perte du sexe et ses conséquences.
Mots clés : parthénogenèse ; évolution clonale ; asexualité ; déclin des traits ; expression génique ; conflit sexuel
Abstract
Sexual reproduction, ancestral to eukaryotes, has been lost several times. Understanding the appearance and persistence of asexual species is a major challenge in evolutionary biology. This thesis explores the genetic basis and evolutionary implications of sex loss in aphids, which exhibit reproductive polymorphism. Their ancestral mode of reproduction is cyclic parthenogenesis (CP, alternating between clonal and sexual generations) but obligate parthenogenesis (OP, clonal only) is commonly observed. OP lineages do not produce sexual females but can still produce males. To characterize the genomic regions involved in the transition from CP to OP reproduction, genomic scans were performed on four aphid taxa revealing different genetic bases. These results suggest that several pathways lead to asexuality in this group. Next, the evolutionary consequences of the loss of sex on traits and genes essential for sexual reproduction were studied. OP males, which are unlikely to pass on their genes (CP and OP lineages are geographically separated) display traits showing signs of decay as expected under relaxed selection. Gene expression in OP parthenogenetic females is no longer constrained by that of other morphs. Resolution of the sexual conflict in these lineages should lead to changes in expression. We found differences in expression between OP and CP morphs, but not always in line with our predictions. This thesis highlights the relevance of using species with polymorphic reproductive systems to understand the evolutionary history of sex loss and its consequences.
Keywords: Parthenogenesis; transition to asexuality; clonal evolution; trait decay; gene expression; sexual conflict